RÉGULATION DE LA PRESSE AU BENIN

 

Le défi va au-delà de la suspension des médias !

 

. La Haac dans une vitesse inquiétante ?

 

Après six mois d'observation, la 7e mandature de la Haute Autorité de l'Audio-visuel et de la Communication (Haac) a prononcé sa première vague de sanction dans l'univers des médias au Bénin. Sous la présidence d'Edouard Loko, la Haac a décidé la suspension de plusieurs médias classiques comme nouveaux. Ce qui confirme la volonté de cette équipe dirigée par un professionnel des médias d'amener les acteurs de l'information à exercer le métier suivant les normes requises. Avec cette première série de sanction, cette Haac rassure quant à son rôle de gardien de la maison mais dégage au même moment une odeur d'inquiétude pour la liberté de la presse et celle d'expression au Bénin.

 

Le mardi 21 janvier 2025, la Haac a pris une série de décision contre plusieurs médias du Bénin. Il s’agit de la suspension des organes de presse écrite classique Le Patriote du journaliste Marcel Zounmènou et l’Audace Info du journaliste Romuald Alingo à qui d’ailleurs la carte de presse est retirée pour non-respect du code de déontologie et de l’éthique de la presse béninoise. A ces deux s’ajoutent les sites internet Reporter Média Monde, Crystal News, les Pharaons et le compte tik tok dénommé Madame Actu pour de « nombreuses plaintes » à leur encontre. 

 

Pour les médias sociaux suspendus, la Haac estime aussi que leurs contenus ne respectent pas « les dispositions du code de l’information et de la communication ainsi que celles de la loi sur la radiodiffusion numérique ». A cet effet, elle a notamment évoqué l’article 252 du code de l’information et de la communication sans énumérer les faits qu’on reproche réellement à ces médias sociaux. 

 

L’allure inquiétante de la Haac

 

Ainsi, la Haac semble se mettre dans une allure préjudiciable à la liberté d’expression au Bénin. D’ailleurs, ces sanctions des médias sociaux semblent s’écarter de la loi sus évoquée puisque le même article 252 dispose que « Toutefois, la création ou l’animation des blogs n’est soumise à aucune autorisation préalable » contrairement à « l’exploitation directe ou indirecte… d’un site internet fournissant des services de communication audiovisuel et de presse écrite… » qui « est subordonnée à l’autorisation » de la Haac. Par conséquent, la Haac semble outrepasser ses prérogatives quand elle se met à prononcer la suspension d’un compte tik tok, des sites internet non hébergés au Bénin. Ce qui devrait relever du domaine des tribunaux de droit commun conformément aux dispositions du code du numérique notamment en son chapitre IX qui prévoit des sanctions pour les infractions de presse en ligne. 

 

A cette allure, la Haac parviendrait à ordonner la fermeture des groupes Whatsapp, des pages facebook, des comptes Instagram, LinkedIn, X, des blogs, youtube et autres qui sont des médias sociaux qui contribuent énormément à la liberté d'expression et dont l’exploitation n’est conditionnée légalement à aucune autorisation de la Haac. Il revenait aux personnes qui ont déposé des plaintes contre les médias sociaux suspendus de saisir les tribunaux pour que la justice fasse son travail comme cela se doit. 

 

Au-delà de la suspension

 

La Haac étant le garant de la liberté de la presse et d’expression au Bénin, pour ne pas laisser l’image d’une hache dans l’esprit des béninois, est appelée à un suivi rigoureux des acteurs de ces médias sociaux dans une démarche de prévention des déviances. Alors, il urge qu’elle se donne une stratégie d’accompagnement des acteurs de ces médias sociaux et surtout ceux d'entre eux qui sont des journalistes à travers des recyclages périodiques tout en leur rappelant leur responsabilité sans se substituer à la justice en cas de déviances. C’est ainsi que Edouard Loko et ses pairs pourront sauver l’image du Bénin et garantir de meilleures conditions d’exercice de la liberté d’expression au Bénin à l’ère du numérique. 

 

Edouard ADODE     

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