TOFFINXWE 2024 SANS ECLAT ET SANS FERVEUR : La fête identitaire de la commune de Sô-Ava sur une pente glissante
20 août 2024TOFFINXWE 2024 SANS ECLAT ET SANS FERVEUR
La fête identitaire de la commune de Sô-Ava sur une pente glissante
. La volonté politique seule ne suffit plus
. Des sacrifices s’imposent
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Après l’édition manquée de 2023, la fête identitaire des fils et filles de la commune de Sô-Ava est encore loin de retrouver l’éclat et la ferveur qu’elle affichait lors de ses premières éditions. Cette initiative qui vise à réunir tous les fils et filles de la commune lacustre autour des questions de développement est désormais sur une pente très glissante. Malgré la volonté politique des autorités de la commune, l’effervescence autour du Toffinxwé va decrescendo avec une baisse drastique d’engouement autour des activités qui meublent cette fête. Alors, il urge de poser le vrai diagnostic de cet état de choses afin de repenser cette initiative qui vient jauger l’amour des fils et filles de Sô-Ava à leur terre natale.
Edouard ADODE
Les 9, 10 et 11 août dernier, la commune de Sô-Ava abritait les activités dans le cadre de la 7ème édition de sa fête identitaire pour se conformer à la mode qui est en cours depuis quelques années dans pratiquement toutes les communes du Bénin s’inspirant du modèle Nonvitcha de Grand-Popo qui est un label. Prévue initialement pour les 27,28 et 29 juillet dernier, les membres du comité d’organisation en collaboration avec le maire de Sô-Ava et le parrain, le député Jean Méjor Zannou, se sont pliés en quatre pour que cette édition ne subisse pas le sort de celle de 2023 qui n’a pas pu être organisée.
Mais malgré le report de la date pour des dispositions pratiques entre temps évoquées par le comité d’organisation, cette 7ème édition est loin de combler les attentes en matière de mobilisation et de ferveur. Même les cérémonies d’enterrement dans cette commune ont plus d’envergure que les festivités du dimanche 11 août dernier qui devraient être le clou de cette édition. Ce fut pratiquement l’affaire du comité d’organisation, du parrain et de quelques amis politiciens. Les bâches étaient clairsemées. De sources concordantes, on déplore une importante quantité invendue du pagne confectionné pour marquer cette édition de la fête qui devrait rassembler tous les fils et filles de Sô-Ava sans aucune distinction de rang social ou d’appartenance politique.
Toffinxwé asphyxiée par les égos et les pagnes
Après les quatre premières éditions qui ont connu un franc succès puisqu’étant dans un véritable élan d’unité, celles qui ont suivi furent un travail fatidique pour les comités d’organisation. Un désintérêt pour cette fête au profit d’autres retrouvailles claniques complique la tâche chaque année. Chaque collectivité et chaque arrondissement de Sô-Ava initient sa fête identitaire en concurrence avec les autres collectivités ou arrondissements voisins. Ce qui fait le menu des causeries partout dans la cité. On se plait à comparer le succès de la fête d’une telle collectivité par rapport à une autre ; ou d’un arrondissement par rapport aux autres. Ainsi, les mêmes personnes qui sont appelées à participer à la fête identitaire de la commune, se retrouvent en adversaires quelques jours plus tôt. Par conséquent, chacun se bat pour rehausser l’image de la fête de sa collectivité ou de son arrondissement reléguant la fête communale au dernier rang.
Dans cet état d’esprit, une concurrence sauvage se fait autour des pagnes qui sont choisis pour ces différentes fêtes qui au finish dévalorisent Toffinxwé au fil des ans. Ce qui fait que banalement, des populations qui pour la plupart ont de la peine à joindre véritablement les deux bouts au cours de certaines périodes de l’année puisque dépendant essentiellement de la pêche et de l’artisanat, engloutissent une bonne partie de leurs économies dans l’achat des pagnes imprimés pour telle ou telle fête de clan. Finalement, le seul individu achète la même année le pagne de la fête de son clan, celui de celle de son partenaire et parfois de ceux de ces amis appartenant à d’autres collectivités ou arrondissements de la même commune. A cela s’ajoutent les autres pagnes circonstanciels qui sont choisis pour des obsèques d’un proche et dans le cadre des fêtes religieuses.
Parrainage politique, l’autre poison pour Toffinxwé
La déchéance de la fête identitaire de Sô-Ava est également la conséquence de la politisation à outrance des questions de développement dans la commune. A cet effet, le système de parrainage de la fête par des personnalités politiques natives de la commune enracine les divisions rendant certains indifférents. Puisque le mérite de la mobilisation est attribué au parrain de chaque édition, l’organisation de la fête devient d’office l’affaire de ce dernier et son parti politique. Au même moment, il doit faire face à l’indifférence des autres leaders politiques du milieu qui se retrouvent dans d’autres formations politiques. Ces derniers quand bien même, ils participent à la fête c’est avec beaucoup de réserve en attendant peut-être leur tour de parrainage pour prouver de quoi ils sont aussi capables.
Des sacrifices s’imposent
Le premier sacrifice consiste à donner à cette fête identitaire toute sa neutralité politique à l’instar de Nonvitcha et de Ouèmèxwé. Ainsi, il est nécessaire de faire de Toffinxwé une affaire des associations à la base sans lui attribuer un parrain politique quand bien même ces leaders politiques peuvent apporter leurs soutiens à l’organisation sans chercher à s’arroger un titre quelconque.
De même, tant que les fêtes de collectivités, de villages et d’arrondissements existeront, il sera difficile de rallier le grand nombre autour de Toffinxwé. Il va falloir donc travailler à étouffer ces fêtes qui créent des rivalités inutiles au sein des communautés de la cité lacustre et épuisent économiquement les populations.
C’est alors que Toffinxwé pourra reprendre un nouveau souffle pour l’unité des fils et filles de la commune de Sô-Ava.